Après 7 mois passée à l’autre bout du monde à explorer chaque recoin de l’Ouest Guyanais, j’ai l’immense plaisir de commencer cette nouvelle série consacrée aux randonnées de ce territoire ultramarin français. Je vous avoue en toute honnêteté, que la Guyane ne ressemble à aucun autre pays ou région que nous avons eu l’occasion de découvrir ces dernières années. En fait, la Guyane ne se découvre pas … Elle se vit tout simplement !
Quand on voit que la forêt guyanaise couvre près de 8 millions d’hectares, c’est là qu’on se rend compte de son incroyable diversité tant dans les espèces végétales qu’animales. Et quoi de mieux que la randonnée pour avoir un « petit » aperçu de cet endroit unique au monde.
On débute donc avec un sentier accessible à tous qui se trouve à Saint-Laurent-du-Maroni sur la route Saint-Jean. Il a la particularité de se trouver sur les vestiges de l’ancien bagne de la Relégation. Comme vous le savez, Saint-Laurent était la capitale du bagne à une certaine époque, elle s’est d’ailleurs construite autour de ces effroyables prisons … Aujourd’hui il ne reste que des ruines que l’on peut visiter un peu partout en Guyane comme ici dans la forêt Saint-Jean.
Dans cet article de blog, on partage notre expérience sur cette randonnée de la Porcherie à Saint-Laurent-du-Maroni ainsi quelques conseils pratiques pour randonner en tout sécurité.
Guyane, terre de Bagne …
Dès 1852, la Guyane est connue pour être une colonie pénitentiaire, Saint-Laurent-Du-Maroni en est même la capitale. Tout commence par un décret du futur Napoléon III. Les condamnés aux travaux forcés, homme et femme, sont alors envoyés en Guyane pour construire des voies et la future ville de Saint-Laurent-du-Maroni. Quand ce n’est pas le transport, c’est la fièvre jaune qui terrasse les bagnards. En 1867, changement de décor : ils sont envoyés en Nouvelle-Calédonie. Mais sous la IIIème République, les bagnes de Guyane renaissent. Dès 1885, ils accueillent les transportés (criminels condamnés aux travaux forcés) ainsi que les relégués (délinquants multirécidivistes). Plus d’une trentaine de camps se côtoient sur ce territoire d’outre-mer, notamment celui des Îles du Salut qui accueillent les déportés (les prisonniers politiques). Ce n’est qu’en 1938 que les députent votent la fermeture des bagnes de Guyane. Mais avec la guerre, les opérations sont retardées et ce n’est qu’en 1953 que fermera le dernier camp de la Transportation à Saint-Laurent. On estime que 70 000 prisonniers ont connu le triste sort de cet enfer vert …
Sentier de la Porcherie sur la route Saint-Jean à Saint-Laurent-du-Maroni
Trouver un logement à proximité de Saint-Jean-du-Maroni
10H. C’est sous une chaleur bien moite, tu sais celle qui te colle à la peau dès que tu sors de la voiture, que nous arrivons à la première entrée du RSMA de St Jean. Le temps est mitigé, légèrement couvert mais qu’importe, pas de pluie à l’horizon, c’est la journée parfaite pour randonner sans se prendre une bonne saucée. Aujourd’hui, nous avons décidé de tester un sentier pas très loin de chez nous. Il faut dire qu’il nous faisait de l’oeil à chaque fois qu’on passait sur cette route : petite pancarte attrayante et le début d’un ponton en bois. En tout cas, ça promet une belle balade dans la forêt amazonienne …
Pour éviter tout danger, on gare la voiture au niveau du panneau d’entrée du RSMA et nous remontons la route à la file indienne pour rejoindre le début du sentier indiqué par une pancarte intitulée « Nouvelle Porcherie ». Les petits sont surexcités et nous avec, cela faisait un petit moment que l’on était pas sorti en raison du mauvais temps (entendez par là, saison des pluies).
Il y a très peu d’informations sur cette randonnée, tant dans les livres touristiques que sur internet. Du coup, on ne savait pas vraiment à quoi s’attendre quand nous l’avons faite pour la première fois. Au final, c’est le sentier parfait pour s’évader une petite heure avec les enfants ! Il est d’une facilité déconcertante : il fait 1,4 km aller-retour avec très peu de dénivelé et surtout, il offre un point de vue plutôt sympa sur les vestiges du bagne. Avec un peu de chance, vous observerez des singes ou même un paresseux si vous restez bien silencieux …
Nous voici de retour sur cette petite passerelle suspendue marquant le début du sentier et qui permet, accessoirement, de traverser un petit cours d’eau. Le cadre est posé : un ponton en bois traversant une végétation dense et éclectique, des lianes au dessus de nos têtes et les bruits sonores de la forêt primaire guyanaise. Tout est là pour nous rappeler que, même si on ne les voit pas, nous ne sommes pas seuls ici. Oiseaux, grenouilles, singes, insectes … C’est toute une faune qui s’active autour de nous !
Petit conseil : faites attention de ne pas glisser au début du ponton. L’humidité ambiante rend les planches en bois glissantes et on peut vite se retrouver les fesses par terre. Je pense qu’il devait y avoir à l’époque une sorte de grillage anti-glisse tout le long mais que celui-ci a disparu au fil du temps, car il y en a qu’à la fin. Contrairement à la Martinique, les sentiers de Guyane ne sont pas tous entretenus régulièrement et/ou ils sont peu fréquentés. Du coup, il faut être extrêmement vigilant et regarder où on met les pieds !
Après un petit « moonwalk » improvisé (entendez par là un dérapage plus ou moins controlé de Nico), nous entrons dans le coeur de la forêt. A l’affut du moindre bruit, du moindre mouvement. Avec un peu de chance, nous pourrons voit des singes ou des paresseux. Pour les insectes, il faut avoir l’oeil. Ils ont tendance à se fondre dans la masse, autant vous dire qu’on en voit pas beaucoup depuis que nous sommes ici. De même avec les reptiles ou les araignées !
Si vous aimez la flore, vous serez servis : fougère arborescente, balisier, heliconia, philodendron, broméliacée … On ne sait plus où donner de la tête. Ce qui est étonnant, c’est de constater qu’il pousse dans cette région de grands … pins ! Des pins caraïbes pour être exacte, une espèce apparemment invasive. Le sol est jonché d’aiguilles et de feuilles mortes formant un épais tapis rappelant les forêts françaises de haute montagne.
Une petite montée à gravir, nous arrivons au point d’orgue de la balade : les ruines du bagne.
Pour les néophytes, il faut savoir que les ruines que vous trouverez dans cette forêt ne sont pas vraiment un bagne mais plutôt les vestiges de la « nouvelle porcherie » construite en 1916 mais qui faisait tout de même partie du Camp de la Relégation de Saint-Jean. Excentrée pour des raisons d’hygiène et de confort, elle se situe sur le plateau de la Cloche. C’est en 1899 que cette vacherie / porcherie vit le jour (surnommée la Bouverie des cultures) mais elle fut détruite en 1912. Elle fut remplacée la même année par une nouvelle bouverie accompagnée d’une bergerie qui prendra le nom de Bureaux Culture.
Même si le site n’est pas à proprement parlé un ancien bagne, il fait partie de l’histoire guyanaise du Bagne. Je vous recommande vivement de combiner cette balade avec la visite du cimetière des Relégués à Saint-Jean-du-Maroni.
Bref en arrivant en haut de la bute, nous sommes donc tombés sur les vestiges de la Nouvelle Porcherie. Une belle surprise car on ne s’attendait vraiment pas à ça en commençant cette randonnée. En mettant de côté tout le pan historique, il faut bien reconnaitre que le décor est plutôt canon : on a l’impression de revoir un de ces films à la Indiana Jones.
Comme nous sommes curieux, nous sommes descendus dans l’antre de la Nouvelle Porcherie pour nous imprégner des lieux. Les petits pas très rassurés au début, pensaient qu’un fantôme allait pointer le bout de son nez ! Heureusement qu’ils sont aussi aventuriers que nous, ils se sont amusés à explorés chaque « box », nous les surveillant derrière au cas où un petit serpent serait caché dans le coin … Mais rien, aucune rencontre !
Comme vous allez le constater sur place, la balade est rapide. Si vous trainez un peu, en 1H le tour est bouclé. Néanmoins, si vous recherchez une randonnée pas trop longue pour des enfants (voire même de jeunes enfants car elle est super accessible), c’est l’endroit parfait pour s’évader tout en découvrant l’histoire de la région.
RANDONNÉE DE LA NOUVELLE PORCHERIE
Saint-Jean-du-Maroni 1,4 km 40 min à 1H Dénivelé : 38 m
CARTE
À Saint-Laurent-du-Maroni, passez l’aérodrome et prenez en direction de la route Saint-Jean D11. Continuez tout droit, laissez derrière vous l’embranchement d’Apatou. Juste avant l’entrée au village Saint-Jean-du-Maroni, vous allez voir un énorme panneau en bois indiquant le RSMA de Guyane. Cette entrée est abandonnée, garez vous par là. Puis remontez à pied quelques mètres en faisant attention aux voitures. Sur la gauche, vous verrez un panneau indiquant le début du sentier « Nouvelle Porcherie ». Traversez et commencez la randonnée.
CONSEILS PRATIQUES
– Dans votre voiture, ne laissez rien qui puisse attirer l’oeil d’un voleur.
– Côté équipement : un petit sac-à-dos avec de l’eau, téléphone chargé et une trousse de secours. Chaussures de randonnées / baskets, on ne randonne pas en forêt en tong. Si vous avez, prenez une machette que vous glisserez dans une poche extérieure du sac-à-dos (si besoin pour dégager le layon ou pour votre sécurité). Pour ce qui est de l’habillement, c’est vous qui voyez mais perso, on préfère mettre un pantalon pour éviter les piqures de moustiques s’il y a ou les pous d’agouttis. Sinon, elle peut se faire en short tant que vous ne trainez pas dans les hautes herbes (badigeonnez vous d’huile de carapa pour être tranquille).
– Si vous partez seul, informez un proche.
– Regardez la météo avant le départ : à éviter lors de fortes pluies, le sentier peut devenir boueux et glissant.
– Le soleil se couche plus tôt ici et en forêt, sous la canopée, il fait plus sombre.
– Ne vous éloignez pas du sentier pour éviter toutes mauvaises rencontres.
– On randonne dans le respect de la faune et de la flore et on garde ces déchets jusqu’à la prochaine poubelle.
À FAIRE À PROXIMITÉ
– Le cimetière des Relégués à Saint-Jean-du-Maroni,
– Forêt de Saint-Jean : un parcours sportif et un parcours balade,
– Balade en kayak dans la mangrove à partir du dégrad de St. Jean,
– Manger un poisson frit ou de la viande de bois au restaurant Saint-Jean avec vue panoramique sur le fleuve Maroni.
OÙ LOGER
– Découvrir les offres d’hébergements disponibles à Saint-Laurent-du-Maroni et ses alentours.
– Trouver un carbet aux alentours de Saint-Laurent-du-Maroni pour poser son hamac.
J’espère que cet article vous a donné envie de découvrir ce lieu à votre tour !
N’hésitez pas à le commenter, partager et épingler sur Pinterest.
A très vite sur le blog,
Marjo & Nico
4 commentaires
un petit coucou à vous 4 – toujours contente de suivre vos aventures à l’autre bout du monde !
j’aime bien, et je viens prendre des nouvelles et en même temps un peu d’exotisme
Nous, on s’est contentés d’une semaine au Mont Dore, on arrive ce soir, mais ça nous a fait du bien
Je vous embrasse fort, profitez bien, prenez soin de vous, et mettez nous encore et encore de jolis articles avec de belles photos
Gros bisous du Gard
Catherine
Coucou Catherine, et merci pour ton message :) Tiens je ne connais pas le Mont Doré, c’était comment vos vacances là bas ? A très vite sur le blog, Marjorie
Magnifique article. Chaque fois que je vous lis j’ai une envie soudaine de partir aller découvrir encore plus minutieusement notre beau pays. Merci de nous faire rêver
Merci Cyrille :) J’espère que vous aurez l’occasion de découvrir la Guyane dès que la situation le permettra, c’est une très beau territoire, sauvage et nature qui mérite le détour !